18 octobre 2007

American IV : The Man Comes Around

Artiste : Johnny Cash

Date de sortie : 5 novembre 2002

Label : American / Lost Highway

Durée : 51'55''

Le dernier album de Johnny Cash, The Man In Black paru de son vivant. Rien de moins. La dernière des quatre pierres précieuses plus noires et majestueuses que le monolithe de 2001 l'odysée de l'espace. Combien d'albums en tout Johnny ? Même lui devait avoir perdu le compte le jour où Rick Rubin, plus connu pour produire Nine Inch Nails, le groupe indus de Trent Reznor, est venu lui dire deux mots backstage.

Oui, lui, Rick Rubin serait ravi d'enregistrer avec la légende vivante de l'Amérique country, Johnny Cash. Et pourquoi pas se dit Johnny. Le concept avait de quoi le séduire. Des chansons de son choix, des reprises (beaucoup, dont des traditionnels), et des compositions nouvelles. Et un emploi du temps assez strict. Répétition ou écriture d'un titre le matin, enregistrement l'après-midi. Et puis le tableau ne serait pas complet si on ne parlait pas des invités qui devaient se sentir (enfin on n'imagine) dans leurs petits souliers (ou leurs petites santiags), Fiona Apple, Joe Strummer...

Et c'est parti pour quatre albums. Et non des moindres. La plus belle façon, sans doute de conclure une carrière certes brillante, mais émaillée de disques insupportables à partir de la fin des seventies et tout au long des années 80.


Le quatrième, le dernier est le meilleur, à moins que ce ne soit le troisième ou un des deux autres. Allez savoir. mais celui-ci contient des merveilles. The Man Comes Around, qui donne son nom à l'album ouvre le disque et c'est déjà une bonne claque. Cash relit la bible encore et encore, et peaufine cette chanson pendant un temps qui lui parait très long, en rêve la nuit, sait que les vers qu'il écrit ne sont pas de lui mais viennent de quelque part, cherche, cherche, puis, soulagé sans doute, retrouve les versets (dans le livre de Job), s'en inspire, les décline. Au final, une chanson que l'on pourrait reprendre en choeur dans une église gospel, un classique sitôt écrit.


Mais Cash ne s'arrête pas là. L'ouverture d'esprit du vieux monsieur et les conseils avisés de Rubin font des merveilles. Une reprise de Hurt de Trent Reznor dont l'original bénéficiait de paroles grandioses et d'arrangements franchement pas au niveau. Cash la transforme en chant d'agonie, chaque mot résonne et raisonne pour celui qui connait un peu les douleurs par lesquelles il est passé jusqu'à sa mort. De la mort de son frère, découpé par une machine, à la maladie, les complications d'une opération de la machoire qui le verront prendre plus de drogue encore. Et aujourd'hui on se dit que Cash nous a quitté si peu de temps après l'avoir enregistrée.

Un clip a même été réalisé par Mark Romanek pour illustrer cette chanson. On y voit le vieux chanteur au piano, à la guitare, perdu dans un musée qui lui est consacré (sa maison qui brûla il y a quelques mois). Nulle doute qu'il n'a pas dû beaucoup tourner sur MTV.


A côté de Hurt ou de The Man Comes Around, Give My Love To Rose est un titre de Cash plus anecdotique mais plus loin, il reprend Bridge Over Trouble Water avec Fiona Apple qui fera aussi une apparition sur Desperado des Eagles.


Hung My head, chanson de Sting prouve que ce dernier pourrait faire tellement mieux que cette néo-pop fatiguante à base de duo branchouilles featuring le dernier petit gars à la mode. Une vraie chanson de Cow Boy, une vraie chanson triste et belle. Aussi triste et belle que First Time I Ever Saw Your Face.


Et puis nouvelle claque. Du Depeche Mode en Boogie Woogie, il fallait oser. Là encore les mots de Personal Jesus, qui décrivent comment les gens se laissent berner par les prédicateurs de la télé et des méga-church avaient de quoi plaire à Cash. Comment il est tombé sur cette chanson ? Difficile de le savoir, mais Martin Gore ne s'en est toujours pas remis.


Suivent une reprise des Beatles, In My Life, deux traditionnels réarrangés par Cash, Sam Hall et Danny Boy (chant d'église à l'orgue), Desperado, I'm So Lonesome I Could Cry de Hank Williams en duo avec Nick Cave, un autre homme en noir...


Streets Of Laredo (un traditionnel) et Tear Stain Letter (Cash) racontent d'autres histoires tristes, parfaites la nuit autour d'un feu de camp.


Et puis le disque se clôt, ironiquement, sur We'll Meet Again...


Alors, comme dans la chanson, on peut dire :

We'll meet again,Don't know where,
Don't know when,
But I know we'll meet again some sunny day...


So Long Johnny.

Ecoutez Hurt :



Ecoutez Personal Jesus :