Artiste : John Lennon & the Plastic Ono Band
Date de sortie : 11 décembre 1970
Label : Apple Records
Rêvons un peu. Chapman a loupé son coup, ou plutôt rien n'est arrivé. Il est reparti tout gentiment chez lui avec son autographe sous le bras et personne n'en a jamais entendu parler. John est rentré chez lui faire un gros dodo avec Yoko pour ne se réveiller péniblement qu'au son du téléphone trois jours plus tard. Au bout du fil ? Mal Evans, roadie de toujours des Beatles et pas mort lui non plus, pas flingué, toujours en circulation dans le business et se demandant comment il a fait pour chanter les choeurs de Yellow Submarine ou jouer du tambourin sur Dear Prudence...
-John ? T'étais mort ou quoi ?
-No Mal, I was only sleeping...
-Dis donc, je viens de m'apercevoir que ça fait dix ans aujourd'hui que tu as sorti ton premier album solo.
-Et ça fera combien quand j'aurai 64 ans ?
-No Mal, I was only sleeping...
-Dis donc, je viens de m'apercevoir que ça fait dix ans aujourd'hui que tu as sorti ton premier album solo.
-Et ça fera combien quand j'aurai 64 ans ?
Beaucoup plus caustique qu'Imagine (dont Lennon déclara qu'il avait été nappé de chocolat pour être plus facile à manger), Plastic Ono Band est le vrai premier album solo de John. Certes, il y avait bien eu les trois albums pour le moins expérimentaux enregistrés avec sa nouvelle épouse. Mais hormis le parfum de scandale causé par la pochette de Two Virgins où les deux amants étaient nus, on ne peut pas dire qu'ils firent parler d'eux dans des termes élogieux. (Unfinished Music N°1 Two Virgins (#124 aux USA) et Unfinished Music N°2 Life With The Lions (#174 aux USA) sortiront avant Abbey Road, The Wedding Album, quelques jours après atteignant la place enviable numéro 178. Un camouflet).
Plastic Ono Band c'est autre chose. Réponse du berger à la bergère (comprenez Paul et son McCartney sorti en avril qui devint numéro un pour trois semaines au Etats Unis), coup de massue produit par le couple et Phil Spector qui commence par l'une des chansons les plus intimes de John depuis Help ou I'm only Sleeping : Mother. Pendant ce temps, Harrison caracole en tête avec son fabuleux triple album All Things Must Pass, également produit par Spector.
Mother, You Had Me, But I Never had You,
Father You Left Me, But I never Left You...
et qui s'achevera par My Mummy's Dead.
La première est une complainte absolument déchirante et directe. Finis les textes où John se cache. Ici, il se montre, plus nu que sur la pochette de Two Virgins. La seconde est comme une berceuse pour les morts, maugrée plus que chantée...
Bien sûr, il y a les jolies chansons pour Yoko, Hold On, Love. Mais il y a surtout Working Class Hero (que reprendra Marianne Faithfull sur Broken English en 1979) chanson au thème quasi springsteenien, et qui lui vaudra le désamour des authorités des Etas-Unis qui voient d'un très mauvais oeil l'arrivée sur leur sol d'un potentiel leader charismatique bien à gauche... Power To The People, n'aide guère non plus. Plus tard, des chansons comme Imagine (jugée inappropriée à la diffusion après le 11 septembre ! pour en savoir plus c'est par ICI), Woman Is The Nigger Of The World ou Give Peace A Chance ne l'aideront pas non plus à obtenir sa carte verte.
Well Well Well est plus anecdotique, Look At Me a beaucoup de charme, et God vaut largement le détour, rien que pour son côté provoc. Serait-il possible de la diffuser en radio aux Etats-Unis ? Rien n'est moins sûr. C'est curieusement une chanson méconnue qui remue le plus l'auteur de ces lignes, Isolation ; encore une chanson intime, sur le couple, le succès, et le médiatisation. L'album, cependant ne fera pas aussi bien que McCartney en se classant huitième au royaume uni et sixième aux USA. L'année suivante sortira Ram de McCartney (Numéro 1 au royaume uni, numéro 2 aux USA) et Imagine, numéro 1 mondial enrobé de chocolat...
Plus de trente cinq ans et pratiquement pas une ride.
Ecoutez Working Class Hero :
Ecoutez Power to the People :